Comment refroidir les réacteurs nucléaires du futur ?
Des chercheurs de l'Institut de technologie de Tokyo ouvrent la voie pour le refroidissement des réacteurs à fusion, alors qu’une percée historique dans le domaine de la fusion nucléaire vient d'avoir lieu.
Selon l'AIE, l'énergie nucléaire représentait environ 10 % de la production mondiale d'électricité en 2020. Ce pourcentage a diminué depuis la fin des années 1990, il s’élevait alors à 18 %, mais le nucléaire reste la deuxième source d'électricité à faibles émissions (c'est-à-dire non fossile) après l'hydroélectricité. [1]
Fusion nucléaire et fission nucléaire
Une centrale nucléaire produit de l'électricité grâce à la chaleur dégagée par la fission d'atomes d'uranium. A contrario, la fusion nucléaire consiste à mettre en contact deux atomes d’hydrogène (deutérium et tritium). [2] Soumis à des niveaux de chaleur et de pression extrêmes, l’hydrogène gazeux se transforme en plasma, un gaz chaud chargé électriquement. Dans une étoile comme dans un dispositif de fusion, les plasmas constituent l’environnement dans lequel les éléments légers peuvent fusionner et produire de l’énergie. [3] La fusion nucléaire est un processus complexe qui ne se produit naturellement que dans l'espace, au cœur de notre Soleil. Longtemps restée au stade théorique, la recherche sur la fusion nucléaire a récemment fait un bond en avant historique. Le 5 décembre 2022, le laboratoire national Lawrence Livermore (LLNL) en Californie a réalisé la première expérience de fusion nucléaire présentant une production nette d’énergie. [4]
Les réacteurs à fusion sont activement développés dans le monde entier comme une forme d’énergie zéro carbone durable car leur combustible peut être extrait d’une réserve inépuisable d’eau de mer. De plus, la fusion se distingue de la fission par une absence de déchets nucléaires. [4] Outre le projet ITER impliquant 35 pays (Japon, UE, États-Unis, Corée du Sud, Chine, Russie et Inde) [3], le développement de la fusion par le secteur privé s’accélère également.
Le refroidissement des réacteurs à fusion
Le « divertor » est l'un des composants essentiels d'un réacteur à fusion ; il assure l'extraction des effluents gazeux et des impuretés du réacteur, et doit être capable de supporter des charges thermiques de surface très élevées. [3] Les chercheurs travaillent à la mise au point d'un divertor solide dans lequel un bloc de matériau résistant à la chaleur, tel que le tungstène, est placé en contact avec le plasma et refroidi à l'eau. Le projet ITER, par exemple, sera doté d'un circuit d'eau de refroidissement. [5] A l’inverse, les chercheurs ont également envisagé de recouvrir le matériau structurel du divertor d’un métal liquide doté d’excellentes performances de refroidissement. Ainsi, l'étain métallique liquide est un excellent agent de refroidissement, mais il présente l'inconvénient de corroder les matériaux structurels.
En décembre 2022, des chercheurs de l'Institut de technologie de Tokyo et de l'Institut national des sciences de la fusion ont publié une étude clarifiant la compatibilité chimique entre l'étain métallique liquide à haute température (Sn) et le martensitique ferritique à activation réduite, un matériau structurel candidat pour les réacteurs à fusion. [6] L’équipe estime que cette découverte contribuera à promouvoir l'utilisation de l'étain métallique liquide non seulement pour l'énergie de fusion mais aussi pour les centrales solaires thermiques. [6]
Sources
[1] IEA (2022), Nuclear Power and Secure Energy Transitions, IEA, Paris https://www.iea.org/reports/nuclear-power-and-secure-energy-transitions
[2] https://www.irsn.fr/FR/connaissances/faq/Pages/Quelle-est-la-difference-entre-la-fusion-et-la-fission.aspx
[3] https://www.iter.org/
[4] https://www.nationalgeographic.fr/sciences/2023/01/avancee-historique-dans-la-recherche-nucleaire
[5] https://www.iter.org/mach/coolingwater
[6] Tokyo Institute of Technology. (2022, December 15). Mitigating corrosion by liquid tin could lead to better cooling in fusion reactors. ScienceDaily. Retrieved January 16, 2023 from www.sciencedaily.com/releases/2022/12/221215104632.htm