Comment réutiliser l’eau de condensation des conditionneurs d’air ?
Revue des différents usages possibles de l’eau de condensation rejetée par les conditionneurs d’air.
Les conditionneurs d’air rejettent des quantités d’eau plus ou moins importantes, selon l’humidité relative de la pièce dans laquelle ils se trouvent. Cette eau de condensation (ou condensats) est produite lorsque l’air humide ambiant traverse l’évaporateur du climatiseur : la température de surface de cet échangeur étant inférieure à la température du point de rosée (température à laquelle la vapeur d’eau présente dans l’air se transforme en eau liquide), l'humidité contenue dans l'air se condense et s'écoule dans le bac à condensats.
Sur les systèmes mobiles, ces condensats peuvent facilement être collectés. Sur les installations fixes, un système d’évacuation est fourni.
La qualité de l’eau de condensation produite par les climatiseurs peut être réutilisée pour l’irrigation des cultures, pour certains processus industriels requérant de l’eau ou pour diverses applications domestiques (arrosage des plantes, alimentation en eau de certains appareils comme les fers à repasser, ou encore alimentation des chasses d’eau). D’après de récentes recherches, après désinfection de l’eau, il est même possible de la boire !
Dans une étude publiée en Août 2019 [1], une équipe de chercheurs a étudié la qualité de l’eau de condensation pour évaluer les différentes possibilités de réutilisation. L’étude a été menée dans deux villes de Palestine, où les ressources en eau sont précieuses.
Les échantillons d’eau ont été prélevés dans des bouteilles en plastique, et les lieux de prélèvement ont été choisis au hasard dans deux villes différentes : dans des commerces, des restaurants, des bâtiments résidentiels. Deux séries de tests ont été effectués.
Dans la première, effectuée juste après la collecte des échantillons, la température, le pH, la conductivité électrique, l’oxygène dissous et les solides dissous étaient mesurés.
Dans la seconde, effectuée en laboratoire, on a mesuré la turbidité de l’eau, la demande biologique en oxygène, la demande chimique en oxygène ainsi que les taux de différents éléments chimiques (incluant entre autres l’arsenic, le sulfate, le cuivre, le sélénium et l’aluminium). Les métaux lourds ont aussi été recherchés.
Les résultats obtenus ont été comparés avec les préconisations fournies par l’Institut des Standards Palestiniens (PSI) pour l’eau potable et l’eau d’irrigation. Les résultats sont présentés dans le tableau suivant :
Ces résultats montrent que l’eau de condensation est d’assez bonne qualité pour être réutilisée en tant qu’eau d’irrigation. En ce qui concerne l’eau potable, les mesures réalisées sur la turbidité et les demandes biologique et chimique en oxygène ne correspondent pas tout à fait aux recommandations nationales.
Les chercheurs ont aussi évalué la quantité de métaux lourds contenue dans les échantillons. Dans certains d’entre eux, les éléments suivants ont été rencontrés : Cu, Fe, Al, Cr, Ba, Zn et Mn.
L’étude conclut qu’en-dehors d’un échantillon où les teneurs en manganèse étaient trop importantes, la réutilisation des eaux de condensat pour l’irrigation ou même pour être bue ne présente pas de risques particuliers.
Les grandes quantités d’eau récupérées (entre 8,63 et 15,1 L par jour et par unité de conditionnement d’air), si elles étaient réutilisées, pourraient permettre de réduire la demande en eau fraîche en Palestine.
Une autre étude publiée dans Renewable Energy and Environmental Sustainability [2] étudie la possibilité de réutiliser les eaux de condensats en tant qu’eau potable. Les chercheurs se sont là aussi intéressés au cas d’un pays chaud, dont les ressources naturelles en eau sont faibles : Oman.
Différentes techniques de désinfection de l’eau sont passées en revue : rayonnement ultraviolet, chloration, chauffage de l’eau à 63 ° C, ozonation, et enfin désinfection solaire.
C’est cette dernière technique qui a été étudiée dans l’article.
D’après les chercheurs, les rayons du soleil peuvent contribuer à la destruction des germes, virus et autres bactéries en raison de la présence de rayons infrarouges et ultraviolets, après un procédé de filtration permettant de retirer les matériaux en suspension.
Pour l’expérience, l’eau de condensation a été collectée dans des bouteilles en pyrex préalablement stérilisées à l’aide d’un autoclave. Les échantillons ont été collectés dans trois villes à des dates différentes.
Différents échantillons ont été prélevés dans les trois villes. Lors de l’analyse, la durée d’exposition aux rayons du soleil ainsi que la température ont été prises en compte.
Les résultats montrent que l’eau récoltée a des propriétés proches de celles de l’eau distillée et que toutes les bactéries de type Coliform et E-Coli sont détruites après 2h d’irradiation à 43 °C.
La méthode de désinfection par le soleil pourrait donc être utilisée pour rendre l’eau de condensation potable dans les endroits où d’autres méthodes de désinfection ne sont pas disponibles. Cette technique a pour avantage d’être particulièrement économique.
Sources :
[1] Lubna Siam, Issam A. Al-Khatib, Fathi Anayah, et al. Developing a Strategy to Recover Condensate Water from Air Conditioners in Palestine. Water, 2020. doi: https://doi.org/10.3390/w11081696
[2] Iessa Sabbe Moosa, Laila Masoud Rashid Al-Iessi, Hussein A. Kazem. Freshwater production and solar disinfection of water released from the air-conditioning cooling system: an experimental investigation. Renewable Energy and Environmental Sustainability, vol. 5, n. 9, 2020. doi : https://doi.org/10.1051/rees/2020004