Economie d’énergie : des initiatives pour le refroidissement dans les centres de données

En janvier 2021, les principaux opérateurs européens du Cloud et des centres de données ont signé un plan d’autorégulation visant la neutralité climatique des centres de données d’ici 2030. Selon des études récentes, les méthodes de refroidissement naturel peuvent être efficaces pour atteindre des objectifs d’économies d’énergie significatifs.

Les centres de données sont des installations de grande capacité dont la fonction principale est d’abriter des équipements informatiques (c.-à-d. des serveurs informatiques) et de fournir des services de stockage des données. [1, 2] Les centres de données sont actuellement responsables d’environ 2 % de la consommation mondiale d’électricité.[3] Selon les scénarios, on estime que les centres de données consommeront environ 3 à 13 % de l’électricité mondiale en 2030, contre 1 % en 2010. [4] Entre 30% et 55% de cette consommation est allouée au refroidissement de l’équipement informatique. [3] 

 

Objectifs d’économie d’énergie 

 

En janvier 2021, 25 entreprises et 17 associations ont signé un Pacte pour des centres de données climatiquement neutres (“Climate Neutral Data Centre Pact”), qui fixe pour objectif la neutralité climatique des centres de données d’ici 2030. Les principaux opérateurs européens du Cloud et des centres de données, dont AWS, Google et Equinix, ainsi que des fournisseurs nationaux de plus petite taille, ont signé cet accord. Le pacte engage les signataires à accroître et mesurer leur efficacité, à n’utiliser que des énergies renouvelables d’ici 2030, à s’engager pour la préservation des ressources en eau, à adopter des pratiques d’économie circulaire tels que la réparation et le recyclage des serveurs, et à réutiliser la chaleur résiduelle. Le groupe promet également d’utiliser la norme « Power Use Effectiveness » (PUE), tout en répondant à la nécessité d’un nouvel indicateur pour remplacer le PUE. [5] 

 

Le PUE est défini comme le rapport entre la quantité d’énergie utilisée par l’ensemble d’une installation de centre de données et l’énergie utilisée uniquement pour l’équipement informatique. Une valeur PUE de 1 représente la situation hypothétique dans laquelle la consommation d’énergie de tous les équipements non informatiques (par exemple : l’éclairage, l’alimentation électrique, les systèmes de communication et de refroidissement) serait nulle. Un PUE moyen est généralement inférieur à 2,0, tandis que les centres de données à haute performance énergétique peuvent atteindre des valeurs inférieures, proches de 1,2. [1] 

 

Dans le cadre du « Climate Neutral Data Centre Pact », tous les nouveaux centres de données situés dans des climats froids devront atteindre un objectif de PUE annuel de 1,3 (en fonctionnement à pleine capacité) d’ici le début de 2025. Les installations situées dans des climats chauds auront pour objectif un PUE de 1,4 seulement, puisqu’ils doivent utiliser de l’énergie pour refroidir leurs serveurs informatiques. Les centres de données existants dont le PUE est plus élevé, auront jusqu’en 2030 pour atteindre ces objectifs. [5] 

 

Pour en savoir plus sur les actions visant à rendre les centres de données neutres sur le plan climatique d’ici 2030, veuillez consulter (site en anglais) : https://www.climateneutraldatacentre.net/self-regulatory-initiative/ 

 

Méthodes de refroidissement naturel [1] 

 

La réduction de la consommation d’énergie du système de refroidissement est le facteur clé pour atteindre un bon score de PUE. Par exemple, la gestion thermique peut être améliorée par l’utilisation appropriée de sources de refroidissement naturel disponibles sur place. 

 

Le refroidissement naturel est défini comme l’utilisation d’une source naturelle de froid (air ou eau) pour refroidir un environnement intérieur. Lorsque la température de la source froide est inférieure à la température de fonctionnement intérieure, le centre de données peut être refroidi sans utiliser de système de froid à compression. Ce mode de fonctionnement est communément appelé cycle à économiseur. Les économiseurs côté air utilisent l’air froid naturel pour refroidir l’environnement du centre de données, tandis que les économiseurs côté eau utilisent de l’eau froide naturelle. 

 

Les économiseurs côté air refroidissent directement ou indirectement l’environnement intérieur du centre de données en utilisant l’air extérieur. Dans le cas d’économiseurs côté air directs, l’air extérieur filtré est aspiré dans l’environnement intérieur à l’aide de ventilateurs, sans aucun conditionnement d’air ni contrôle de l’humidité. Les économiseurs côté air directs présentent l’avantage d’être moins complexes car ces systèmes ne nécessitent pas de pompes, de tours de refroidissement ou d’échangeurs de chaleur.  

Les économiseurs côté air indirects utilisent un échangeur de chaleur air-air intermédiaire, entre le flux d’air intérieur recyclé et le flux d’air extérieur. L’étape supplémentaire de transfert de chaleur réduit l’efficacité de l’ensemble du système. Toutefois, dans des régions où le taux d’humidité est élevé et constant, les économiseurs côté air indirects peuvent fournir plus d’heures de refroidissement naturel que les économiseurs côté air directs. 

 

Dans l’ensemble, la performance des économiseurs de type direct ne dépend que du climat de la région et des conditions d’exploitation intérieures, tandis que la performance des économiseurs indirects dépend également de l’échangeur de chaleur. 

 

Les économiseurs côté eau peuvent être classés en tant que systèmes de refroidissement à l’eau direct, systèmes refroidis par air et systèmes à tour de refroidissement.

Dans les systèmes de refroidissement à l’eau directs, l’eau froide naturelle est utilisée pour refroidir l’air intérieur du centre de données sans aucune autre étape de transfert de chaleur. 

Les systèmes refroidis par air utilisent des échangeurs de chaleur pour refroidir l’eau de circulation. Malgré une efficacité moindre (c’est à dire moins d’heures de refroidissement naturel), ces systèmes sont plus simples que les systèmes de refroidissement à l’eau directs et limitent l’impact environnemental causé par la consommation d’eau. 

Les systèmes à tour de refroidissement utilisent une tour à évaporation d’eau pour réduire la température de l’eau de circulation. Selon les auteurs, les systèmes à tours de refroidissement sont les plus utilisés dans la catégorie des économiseurs côté eau parce qu’ils permettent de surmonter la plupart des problèmes rencontrés par les autres types de systèmes. Le taux de consommation d’eau d’une tour de refroidissement ne représente qu’environ 5 % de celui d’un système de refroidissement à l’eau direct. De plus, la quantité d’eau chaude rejetée est très faible, ce qui réduit les dommages environnementaux. 

 

Impact des méthodes de refroidissement naturel sur la consommation d’énergie 

 

Dans un rapport de 2012, le consortium Green Grid avait estimé que le recours au refroidissement naturel pourrait se traduire par des économies d’environ 20 % en termes de coûts, de consommation d’énergie et d’émissions de carbone liés au refroidissement, par rapport aux centres de données n’utilisant pas de refroidissement naturel. [1] 

 

Par exemple, il semblerait que l’un des centres de données de Facebook utilise un système direct d’économiseur côté air, avec une valeur de PUE pouvant atteindre 1,09. Un des centres de données de Google utilise un système direct d’économiseur côté eau, atteignant une valeur PUE inférieure à 1,20. De précédentes études ont montré qu’un système indirect d’économiseur côté air avec un échangeur de chaleur efficace peut permettre de réaliser une économie d’énergie de 63,6 %. Une étude réalisée en Chine a révélé un taux d’économie d’énergie d’environ 19,2 % en utilisant un système indirect d’économiseur côté eau avec une tour de refroidissement ouverte. [2] 

 

Une récente étude publiée dans la Revue Internationale du Froid a proposé une méthodologie pour évaluer l’exploitation du refroidissement naturel pour des centres de données au Brésil. Les auteurs ont utilisé le point d’approche de l’échangeur de chaleur appliqué aux directives thermiques de l’ASHRAE, avec des données météorologiques locales pour estimer le nombre d’heures pendant lesquelles un centre de données peut être refroidi sans compresseur. [1] Ils ont constaté que des villes telles que Curitiba, São Paulo, Porto Alegre et Brasília pouvaient fonctionner aussi bien en mode économiseur côté air qu’en mode économiseur côté eau pour plus de 3000 h par an, même en utilisant des valeurs conservatives pour les limites de l’exploitation thermique des centres de données. 

 

Pour plus de détails sur leur évaluation et la méthodologie utilisée, veuillez consulter le site : https://iifiir.org/en/fridoc/free-cooling-potential-for-brazilian-data-centers-based-on-approach-143201 

 

Les limites des méthodes de refroidissement naturel 

 

Bien que les technologies de refroidissement naturel permettent d’importantes économies d’énergie, elles présentent certains inconvénients. Les économiseurs côté air directs peuvent affecter les paramètres environnementaux des centres de données. Les inconvénients comprennent la contamination par la poussière et la fiabilité réduite du centre de données en raison de l’absence de régulation de l’humidité ou de la température. [1] Les économiseurs côté eau directs sont limités par la disponibilité en eau froide, ce qui signifie que le centre de données doit être situé à proximité de sources d’eau. Les économiseurs côté eau indirects peuvent être confrontés au problème du gel de l’eau de refroidissement. Par conséquent, il est nécessaire de mettre en place des technologies de refroidissement qui peuvent utiliser efficacement les sources naturelles de froid sans être limitées par l’emplacement et le climat. [2] 

 

 

Sources 

[1] Amado, E. A., P. S. Schneider, and C. S. Bresolin. Free cooling potential for Brazilian data centers based on approach point methodology. International Journal of Refrigeration 122: 171-180. https://doi.org/10.1016/j.ijrefrig.2020.11.010 

[2] Han, Z., Sun, X., Wei, H., Ji, Q., & Xue, D. (2020). Energy saving analysis of evaporative cooling composite air conditioning system for data centers. Applied Thermal Engineering, 116506. https://doi.org/10.1016/j.applthermaleng.2020.116506 

[3] The Role of Refrigeration in the Global Economy (2019), 38th Note on Refrigeration Technologies. http://dx.doi.org/10.18462/iif.NItec38.06.2019 

[4] Andrae, A.S.G.; Edler, T. On Global Electricity Usage of Communication Technology: Trends to 2030. Challenges 2015, 6, 117-157. https://doi.org/10.3390/challe6010117 

[5] https://datacenter-magazine.fr/climate-neutral-data-centre-pact-le-plan-dautoregulation-propose-a-leurope/