Faits saillants de Cryogenics 2021 : les applications de l’azote liquide
La cryoconservation de matériel biologique pour favoriser la biodiversité et le refroidissement de câbles supraconducteurs afin de permettre la transmission de l’énergie électrique avec une résistance nulle sont deux applications majeures de l’azote liquide.
Les applications de l'azote liquide sont nombreuses. On peut citer la congélation et le transport de produits alimentaires, la cryoconservation d'échantillons biologiques, l'utilisation comme agent de refroidissement pour les supraconducteurs, les pompes à vide et autres matériels et équipements. L'azote liquide est également utilisé en cryothérapie pour éliminer les anomalies cutanées, protéger les matériaux contre l'exposition à l'oxygène, refroidir les matériaux pour faciliter l'usinage ou la fracturation et même la préparation gastronomique moléculaire d'aliments et de boissons inhabituels. (1)
Lors de la conférence Cryogenics 2021 de l'IIF en octobre dernier, les chercheurs ont présenté deux des applications les plus notables de l'azote liquéfié.
Une chercheuse ukrainienne (2) a présenté l'historique et les perspectives de l'azote liquide pour la cryoconservation de matériel biologique. Le développement de la civilisation humaine a considérablement accru la pression anthropique sur l'environnement naturel dans lequel elle vit. Les biologistes ont été les premiers à constater la diminution de la diversité biologique de la flore et de la faune, et Nikolai Ivanovich Vavilov a été l'un des premiers à comprendre la nécessité de stocker les ressources végétales ex situ sous forme de graines. Il organisa 180 expéditions (de 1924 à 1939) sur tous les continents et collecta du "plasma germinatif" de plantes cultivées et de leurs espèces sauvages dans les principaux centres d'origine des espèces. La collection se composait de plusieurs tonnes de graines stockées entre +4 °C et –10 °C dans la Kuban Genetic Seed Bank. La corrélation entre température ultra-basse et viabilité des objets vivants a été étudiée par de nombreux chercheurs. Raoul Pictet, physicien suisse, a été le premier à liquéfier l'azote (-196 °C) en 1877, ouvrant la voie à la préservation à long terme des matières vivantes des espèces de la faune et de la flore. L'utilisation pratique de l'azote liquide a commencé au 20e siècle. Les avantages de la cryoconservation sont la simplicité et l'applicabilité à une large gamme d'objets. Toutes les parties de plantes peuvent être conservées par cryoconservation. L'auteur conclut que l'utilisation de la conservation à long terme de la matière vivante à la température de l'azote liquide est très importante pour l'avenir de la civilisation humaine. La préservation de la viabilité des semences assure le pourcentage de germination maximal, ce qui est la garantie d'un rendement de culture élevé et de haute qualité. La préservation du matériel génétique, principalement des échantillons de plantes qui permettent la vie humaine, devrait être une priorité absolue parmi les nombreuses installations de cryoconservation, en particulier en relation avec le changement climatique, qui augmente le risque de déclin de la diversité biologique.
Des chercheurs allemands (3) ont présenté les dernières avancées en matière de refroidissement de longs câbles supraconducteurs avec l'azote liquide. Les supraconducteurs à haute température (HTS) pour le transport de l'énergie électrique dans les réseaux de distribution ou les systèmes industriels sont constitués de matériaux céramiques qui atteignent leur température critique proche du point d'ébullition de l'azote liquide (-196 °C / 77 K) et perdent ensuite complétement leur résistance électrique. Grâce à ce phénomène physique, le courant électrique peut être transporté sans perte. Lorsque l'on compare énergétiquement les câbles conventionnels aux câbles HTS, l'économie de pertes ohmiques qui réchauffent les lignes de transmission en cuivre ou en aluminium s'oppose au besoin énergétique de refroidissement des systèmes HTS. Des fils supraconducteurs sont intégrés dans des cryostats à câbles à travers lesquels circule de l'azote liquide sous-refroidi pour éliminer l'entrée de chaleur à travers l’isolation thermique. L'azote en circulation est refroidi dans un sous-refroidisseur, dans lequel l'azote liquide s'évapore sous vide pour générer du froid. La pression d'évaporation peut être réduite à 150 mbar, la température d'évaporation est alors de –209 °C (64 K). Des températures plus basses ne sont pas admissibles car l'azote gèle à -210 °C (63 K). En plus de l'entrée de chaleur à travers le cryostat, les pertes hydrauliques dues à l'écoulement d'azote liquide et à l'apport de chaleur associé des pompes de circulation sont également importantes, en particulier avec des câbles plus longs. La puissance de refroidissement supplémentaire requise peut être assurée par l'installation de stations de refroidissement intermédiaires.
Selon un nouveau concept de refroidissement proposé par les chercheurs, le cryostat est équipé d'un bouclier refroidi activement. De ce fait, le flux de chaleur agissant sur le supraconducteur peut être réduit d'un facteur de l'ordre de 10 par rapport à un simple cryostat. Le débit massique d'azote liquide requis est alors également réduit d'un facteur 10 et la chute de pression d'écoulement est réduite d'un facteur 100. Il est alors possible de mettre en œuvre des concepts de refroidissement sans pompes de circulation ni refroidisseurs intermédiaires, même avec de longs câbles. Les coûts de la technologie de refroidissement et la consommation d'énergie diminuent considérablement.
Sources :
(1) https://www.thoughtco.com/liquid-nitrogen-facts-608504
(2) https://iifiir.org/fr/fridoc/azote-liquide-et-preservation-du-materiel-genetique-d-origine-144384