Le boom du conditionnement d’air en Asie du Sud-Est
Un nouveau rapport de l'AIE (1) met en avant les conséquences de la forte croissance attendue du conditionnement d’air en Asie du Sud-Est ainsi que les possibilités de limiter son impact en termes de consommation d'énergie et d'émissions de CO2. Ce rapport concerne les dix pays de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ANASE) : Cambodge, Brunei, Indonésie, Laos, Malaisie, Myanmar, Philippines, Singapour, Thaïlande et Viet Nam.
La consommation d’électricité pour le refroidissement des bâtiments dans la région a été multipliée par 7,5 en 30 ans, passant de 10 térawattheures (TWh) en 1990 à près de 75 TWh en 2017. Seules la Chine et l'Inde ont connu une augmentation comparable de la consommation d'électricité liée au refroidissement au cours de la même période.
Dans le même temps, le nombre de climatiseurs reste relativement faible dans la région. Seulement 15 % des ménages des pays de l'ANASE possèdent un climatiseur, contre plus de 90 % des ménages dans certaines économies développées. Il existe également de grandes différences de taux d’équipement dans la région : près de 80 % des ménages à Singapour et en Malaisie ont un climatiseur, contre moins de 10 % au Cambodge, en Indonésie, aux Philippines et au Viet Nam. Cela suggère qu'il existe un potentiel important de croissance du marché du conditionnement d’air dans plusieurs pays de la région, notamment dans des pays tels que l'Indonésie et la Thaïlande.
Selon l'AIE, sous l’impulsion de la hausse des températures et des revenus, le nombre total de climatiseurs pourrait passer de 40 millions d'unités en 2017 à 300 millions en 2040, dont la moitié en Indonésie. D'ici 2040, 60 % des ménages des pays de l'ANASE auront accès au conditionnement d’air, avec près de deux climatiseurs en moyenne par ménage. La consommation d’électricité correspondante devrait ainsi passer de 75 TWh en 2017 à 300 TWh en 2040. La part du conditionnement d’air dans la consommation totale d'électricité des pays de l'ANASE augmenterait en conséquence de plus du double, pour atteindre près de 19 %, contre 8 % en 2017.
En l'absence de mesures plus strictes pour encourager l'adoption d'équipements plus efficaces, la demande croissante d'électricité issue de la climatisation seule nécessiterait une capacité de production supplémentaire d'environ 200 GW en 2040 et les climatiseurs pourraient représenter jusqu'à 30 % de la demande de pointe en électricité de la région.
Toutefois, des politiques plus strictes concernant l'efficacité des climatiseurs et des bâtiments pourraient être adoptées conformément au Scénario de Développement Durable de l'AIE, ce qui pourrait permettre d'économiser jusqu'à 110 TWh d'ici 2040. Les valeurs moyennes actuelles de l'efficacité énergétique saisonnière d'environ 4,0 devraient augmenter pour atteindre environ 6,0 d'ici 2030 et 8,0 d'ici 2040 afin de réaliser de telles économies d'énergie.
En plus de réduire les émissions de CO2 de près de 30 millions de tonnes, soit l'équivalent des émissions de plus de 6 millions de voitures, ces économies permettraient de réduire les besoins en capacité de production d’électricité d'environ 100 GW d'ici 2040, soit près de la moitié des besoins supplémentaires.
L'AIE estime que les gouvernements des pays de l'ANASE pourraient augmenter considérablement leurs normes minimales de performance énergétique applicables aux climatiseurs, sans nuire à l'industrie locale ni augmenter les coûts pour les consommateurs. L'efficacité moyenne des climatiseurs vendus aujourd'hui dans les pays de l'ANASE est bien inférieure à celle des modèles les plus performants. En effet, les meilleures technologies de conditionnement d’air disponibles sont déjà plus de deux fois plus efficaces que la moyenne du marché, ce qui indique un important potentiel inexploité en faveur d’un refroidissement efficace dans la région.
(1) Agence Internationale de l’Energie, The Future of Cooling in Southeast Asia https://www.iea.org/southeastasiacooling2019/