Le point sur le trafic illégal de HFC en Europe

Une enquête de l’EIA met en lumière les différents itinéraires de contrebande utilisés pour importer illégalement des HFC en Europe et montre quels sont les frigorigènes les plus fréquemment vendus par ce biais. 

Dans le cadre de la réglementation F-Gaz, l’Union européenne doit réduire l’utilisation des gaz à fort potentiel de réchauffement planétaire (ou GWP en anglais). Après l’interdiction des gaz HCFC et CFC, les HFC doivent eux aussi être réduits drastiquement, avec quelques palliers clés. En particulier, à partir du 1er janvier 2020, les gaz fluorés avec un PRP supérieur ou égal à 2500 sont interdits pour l’entretien et la maintenance des équipements frigorifiques, à quelques exceptions près, comme pour les équipements militaires ou les équipements conçus pour refroidir des produits à une température inférieure à 50 °C.  

 

Depuis la mise en place du Règlement F-Gaz, la Commission Européenne détermine la quantité de HFC que chaque société qui produit ou importe des HFC en vrac est autorisée à placer sur le marché : il s’agit d’un système de quotas.  

 

Néanmoins, ce système a engendré l’émergence d’un commerce illégal de frigorigènes car certaines sociétés importent des HFC hors quotas.  

 

L’Agence d’Investigation Environnementale (EIA) a publié une enquête en juillet dernier sur le trafic illégal de HFC en Europe. 

 

Les enquêteurs de l’EIA se sont faits passer pour des intermédiaires cherchant à fournir des clients d’Europe de l’ouest en HFC en-dehors des quotas réglementaires. Ils ont identifié deux principaux itinéraires de contrebande passant par la Roumanie : l’un en provenance d’Ukraine, l’autre en provenance de Turquie.  

Dans une des méthodes d’import illégal identifié, les frigorigènes sont produits en Chine et importés en vrac en Turquie, où ils sont ensuite divisés en plus petits lots pour être acheminés jusqu’en Roumanie, en transitant probablement par la Bulgarie.  

Les enquêteurs de l’EIA auraient ainsi pu obtenir 17,5 tonnes de HFC hors quota, ce qui représente 31 255 tonnes de CO2

 
L’enquête confirme donc le rôle de la Roumanie en tant que point d’entrée et zone de transit pour les HFC illégaux à destination de pays tels que l’Allemagne, l’Espagne, la Belgique, l’Italie, la France ou l’Angleterre.  

La corruption semble aussi avoir un rôle important pour le passage des marchandises à la frontière ukrainienne. Quatre intermédiaires contactés par l’EIA indiquent avoir versé des pots-de-vin aux douaniers, pour une valeur de 20 à 30€ par bouteille de frigorigène. 

 

D’après les mêmes sources, le R404A est un frigorigène facile à obtenir en contrebande. Le rapport s’est en outre intéressé aux chiffres de frigorigènes illégaux saisis par les pays membre de l’UE. Le R404A représente 34  % des frigorigènes saisis, suivi du R134a (19 %) et du R32 (11 %). 

 

Le rapport donne aussi des chiffres concernant les imports légaux de HFC dans l’Union européenne entre 2016 et 2020. Ceux-ci ont régulièrement diminué entre 2016 et 2019 et légèrement augmenté en 2020. 

 

Les chiffres des imports illégaux sont quant à eux difficiles à obtenir, néanmoins ils peuvent être estimés à partir des chiffres des exports depuis la Chine, le pays n’étant pas soumis au Règlement F-Gaz. Le rapport constate ainsi que les exports vers des pays voisins de l’Union européenne, comme la Turquie, la Russie ou l’Ukraine, ont augmenté de 96 % depuis 2014. 

 

Ainsi, la Turquie aurait importé 38 tonnes de HFC en moyenne entre 2007 et 2013. À titre de comparaison, ce chiffre s’élèverait à 1 002 tonnes en 2018.  

 

Cette année-là, le chiffre des exportations rapportées par la Chine était plus important que celui des importations rapportées par l’Union européenne. Cette différence était plus ténue sur les années suivantes (2019 et 2020). 

 

 

D’après l’EIA, ce trafic illégal représente une menace pour les objectifs climatiques de l’Union européenne. Bien que l’ampleur du commerce illégal de HFC ne puisse pas être estimée avec précision, l'EIA estime qu'elle est importante, probablement entre 20 et 30 pour cent du commerce légal. 

 

Pour consulter le rapport, veuillez suivre ce lien.